Les pharmaciens enfreignent le droit pénal, déclare le Dr Marc Moens
BRUXELLES 06/02 - Les éditions du vendredi 2 février de la ‘Gazet van Antwerpen’ et du ‘Tijd’ annonçaient que les pharmaciens d’officine allaient vendre 25 autotests dans leurs pharmacies, afin de pouvoir dépister à domicile les taux de cholestérol trop élevés, la carence en fer, l’intolérance au gluten ou encore les problèmes de fertilité chez l’homme.
L'autotest le plus connu est bien sûr le test de grossesse, devenu familier depuis longtemps pour les femmes qui veulent tomber enceintes. L'autotest VIH, et un test qui analyse la présence de sang dans les selles, indicatrice d'un cancer du colon potentiel, ont été mis en vente récemment. Mais le secteur des produits médicaux voit aujourd'hui des possibilités de profit dans un nombre beaucoup plus élevé de types de tests à domicile.
Cela se verra clairement dans votre pharmacie. Les premiers tests à arriver sur le marché permettront de diagnostiquer entre autres l'intolérance au gluten (dans une goutte de sang), les infections urinaires et une bactérie susceptible de provoquer des ulcères ou des cancers de l'estomac (à dépister dans une goutte de sang).
L'association de médecins Domus Medica a réagi plutôt défavorablement à cette tendance aux autotests : « On crée ainsi des besoins et des problèmes qui n'existent pas. » Les pharmaciens, en revanche, sont assurément positifs dans leurs réactions et voient dans les autotests une possibilité d'intégrer leur rôle de conseiller, qu'ils souhaitent accroître l'avenir.
« Quel que soit le résultat de l'un de ces autotests, le pharmacien est là pour donner des explications et pour conseiller son patient de consulter un médecin, le cas échéant. C'est à ce dernier que revient la tâche de poser un diagnostic, » a expliqué Georges Verpraet, vice-président de la KAVA (Koninklijke Apothekers Vereniging van Antwerpen). Les associations de pharmaciens vont assurer dès le mois prochain la formation de pharmaciens afin qu'ils se familiarisent avec l'utilisation des autotests.
Le Dr Marc Moens, président de l'ABSyM, met très clairement les points sur les i. « Nous apprenons que ‘quel que soit le résultat qui suit l'autotest, le rôle du pharmacien est de donner des explications et de diriger son client vers un médecin si nécessaire.' », écrit-il.
« Le pharmacien est formé pour donner des conseils lorsqu'il dispense des médicaments, et non pour commenter des autotests ni pour y ajouter un éventuel diagnostic. Ils commettent une infraction pénale quand ils se livrent à l'exercice illégal de la médecine, ce qui est clairement le cas ici. Une procédure a déjà été engagée au Limbourg. La spécialisation médicale en biologie clinique (5 ans de formation après sept années d'études de médecine, et six à partir de 2018), existe pour apprendre à effectuer des tests en laboratoire de qualité et d'une manière médicalement responsable, et trouver ensuite le traitement approprié. Les pharmaciens qui suivent une formation complémentaire de 5 ans après leurs études pharmaceutiques peuvent aussi acquérir le titre de biologiste clinique. Ils sont alors habilités à prodiguer ces prestations de la médecine spécialisée. Les pharmaciens d'officine n'ont reçu aucune formation dans ce domaine.
Afin de pouvoir effectuer des tests de cette nature, les laboratoires qui les exécutent doivent satisfaire à des critères de qualité très sévères. Ils sont totalement absents dans ce cadre. Ce nouvel engouement va coûter de l'argent aux patients, et, en cas du moindre doute – et il y en aura sûrement – une analyse classique sera demandée à un laboratoire clinique autorisé par un biologiste clinique reconnu. Ceci entraînera des dépenses pour l'INAMI, après que le généraliste ait donné une consultation et prescrit une analyse, peut-être à juste titre, mais peut-être aussi indûment. Il s'agit d'une forme indésirable de médecine préventive qui va provoquer une explosion de coûts injustifiés dans l'assurance maladie-invalidité. »
Dr Marc Moens, biologiste clinique,
Président de l'Association Belge des Syndicats Médicaux (ABSyM),
Vice-président de l'Union professionnelle belge des médecins spécialistes en bio-pathologie médicale.
Source: Mediquality
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