Violence à l'encontre des médecins: nos généralistes, les Drs Lutte et Herry, témoignent
Menaces, insultes, parfois agressions physiques: 8 médecins sur 10 y ont déjà été confrontés. Pour mettre fin à ces violences, le service public fédéral intérieur et la direction générale Sécurité et Prévention lancent une campagne à destination des patients, de plus en plus exigeants.
Médecin généraliste à la campagne depuis plus de 25 ans, Philippe Lutte effectue de nombreuses visites à domicile, y compris la nuit. Cette après-midi, lorsque nous l'avons suivi, c'est chez un patient fidèle et compréhensif qu'il s'est rendu. Ce n'est pas toujours le cas. "J'ai déjà subi plusieurs agressions en visites à domicile, pas liées nécessairement au patient qui m'avait appelé, mais par un tiers ou une personne de l'extérieur", confie Philippe Lutte. "Evidemment cela se passe toujours le soir. D'ailleurs, ma femme accepte la manière dont je travaille, mais elle a quand même la peur au ventre très régulièrement".
"Il a réagi en étant furieux et en prenant le matériel de mon bureau et en le mettant à terre"
Les agressions physiques s'ajoutent à une violence verbale, qui est parfois subie au cabinet. Philippe se souvient d'un patient qui exigeait un médicament en doses trop importantes. "Il a réagi en étant furieux et en prenant le matériel de mon bureau et en le mettant à terre. 'Puisque c'est comme ça j'irai le chercher ailleurs'. C'est vrai que la situation a fortement changé, et qu'il y a une agressivité qui est beaucoup plus présente maintenant qu'auparavant", estime le docteur Lutte.
Nous nous sommes rendus dans un espace médical de la région liégeoise. La sécurité y a progressivement été renforcée. "Nous avons installé une caméra dans l'accueil. Il y en a une autre à l'entrée et la secrétaire est là aussi pour assurer la sécurité", explique Luc Henry, médecin généraliste et vice-président du syndicat médical ABSyM.
"Je pars avec le minimum de monnaie sur moi. Je ne prends aucune carte bancaire"
Les médecins évitent également de conserver de l'argent liquide, au cabinet comme en déplacement. "Si je suis appelé dans un endroit que je connais pas en garde, par exemple la nuit surtout, je suis prudent. Je pars avec le minimum de monnaie sur moi. Je ne prends aucune carte bancaire", indique Luc Herry.
"C'est plus vraiment des demandes, c'est des exigences des patients. Ils arrivent et il leur faut un certificat. C'est 'Je veux'. On n'est pas obligé non plus de tout accepter. Il y a des choses qui sont totalement surréalistes, mais là on essaie de trouver les mots pour ne pas que la personne en face de nous s'énerve de trop", commente Jennifer Debart, médecin généraliste.
209 signalements en 3 ans
Selon les statistiques de l'ordre des médecins et de la VUB, huit praticiens sur dix auraient déjà été agressés au cours de leur carrière. Ces trois dernières années, 209 cas ont fait l'objet d'un signalement, un chiffre sans doute inférieur à la réalité.
À propos de l'ABSYM
Nous défendons une médecine libre avec un modèle de rémunération à l'acte, complétée par des forfaits.
Par exemple, en médecine générale, nous défendons toutes les formes de pratique et pas seulement les pratiques de groupe multidisciplinaires comme nos concurrents.
Le médecin généraliste solo doit pouvoir garder sa place.
En ce qui concerne les spécialistes, nous défendons tous les spécialistes y compris ceux qui exercent en dehors de l'hôpital.