AVENIR DU FINANCEMENT HOSPITALIER

11 octobre 2013

La Ministre a décidé une réforme du financement des hôpitaux. Elle envisage un financement forfaitaire prospectif et, après consultation du Centre fédéral d’Expertise des soins de santé (KCE), voudrait lancer un débat sur le sujet en ayant fixé la feuille de route.
Selon les affirmations de la Ministre, le débat devrait être ouvert. Il n’est pas contestable que le financement des hôpitaux, de réforme en réforme, est devenu très complexe et qu’une réflexion peut être utile.
Si  le cadre d’un financement forfaitaire prospectif s’impose

La Ministre a décidé une réforme du financement des hôpitaux. Elle envisage un financement forfaitaire prospectif et, après consultation du Centre fédéral d’Expertise des soins de santé (KCE), voudrait lancer un débat sur le sujet en ayant fixé la feuille de route.

Selon les affirmations de la Ministre, le débat devrait être ouvert. Il n’est pas contestable que le financement des hôpitaux, de réforme en réforme, est devenu très complexe et qu’une réflexion peut être utile.

Si  le cadre d’un financement forfaitaire prospectif s’impose, le débat tournera fatalement court. Le seul mérite de ce système est de permettre, aux décideurs et financiers du système, d’avoir en mains l’instrument d’une maîtrise des dépenses immédiates ; Il suffit d’en décider : 5, 10, 20% en moins et c’est fait mais, il est faux de prétendre que le patient n’en souffrirait pas. De telles mesures ont pour conséquences inévitables le rationnement et une détérioration de la qualité des soins.

Par ailleurs Il n’est pas étonnant,  qu’en même temps que la volonté d’installer ces forfaits, le cabinet veuille imposer des systèmes d’accréditation des pratiques et des hôpitaux censés améliorer la qualité. Sont-ils seulement capables de la maintenir si le financement ne suit pas ? Ils alourdissent seulement la facture.

Le cabinet a chargé le Centre fédéral d’Expertise des soins de santé d’étudier les conséquences de ce type de financement dans des pays où il existe. Le KCE a choisi l’Angleterre, l’Allemagne, les Pays-Bas, la France (en ce qui concerne les hôpitaux publics) et le système Medicare aux Etats-Unis.

Ce rapport est très mitigé. Et comment ne le serait-il pas ?

Les économistes n’arrêtent pas de nous dire que ce type de financement est nécessaire pour maîtriser les budgets et pérenniser la sécurité sociale mais dans quatre des pays comparateurs sur cinq, les dépenses sont largement plus importantes. Seule l’Angleterre dépense proportionnellement moins que nous mais au prix d’un rationnement impitoyable qui exclut les personnes âgées  de toute une série de soins pourtant vitaux (comme la dialyse), au prix de listes d’attente et des règles les plus élémentaires d’hygiène dans les hôpitaux.

L’Angleterre n’est d’ailleurs pas le seul  pays des cinq à rationner les soins. Les Pays-Bas appliquent officiellement des règles de rationnement. Dans Medicare aux Etats-Unis, les médecins se partagent une partie des bénéfices des économies engrangées. Ils se paient donc avec ce qu’ils refusent aux malades.

La France ne fait pas du rationnement systématique et les listes d’attente n’existent pas mais le forfait des hôpitaux peut avoir d’autres conséquences. C’est ainsi que Jean-Marie Cavada nous montrait à « La Marche du Siècle » il y a quelques années (et avec un forfait quelque peu différent qu’un forfait par pathologie), des chambres et des couloirs d’hôpitaux complètement vides à la mi-novembre parce que toute activité hospitalière avait été interrompue par épuisement du budget.

 

Les forfaits hospitaliers ont d’ailleurs d’autres conséquences que les listes d’attente et le rationnement. On peut noter une certaine démotivation à travailler bien au-delà des heures normales de travail, ce qui entraîne des reports d’activité et aggrave les listes d’attente.

On note aussi la délégation des tâches. En Angleterre, ce sont les nurses qui font les frottis de col et même les gastroscopies. Techniquement, elles en sont bien capables mais sont-elles formées à prendre des décisions médicales immédiates quand la situation l’exige ?

Il y a aussi un risque de perte de la médecine de proximité dont jouit notre population. On peut se plaindre du nombre d’examens réalisés en Belgique mais ceux-ci sont à la portée de tous. Non seulement, les patients n’attendent pas mais bénéficient d’examens et de soins dans leur environnement proche.

Pour les étrangers, travaillant en Belgique et bénéficiant des soins dans notre pays, qui peuvent comparer à ce qui se passe dans le leur, il n’y a pas photo.  En Belgique, le patient est pris en charge sans délai d’attente, il a le libre choix de l’établissement où il va se faire soigner et du médecin auquel il veut avoir recours. Ils sont aussi frappés par le temps que les médecins leur consacrent et par la facilité avec laquelle ils peuvent demander un second avis.

Tous ces avantages sont offerts dans le cadre d’un budget qui s’inscrit dans la moyenne des pays occidentaux et qui est certainement inférieur à celui de tous nos voisins immédiats.

Les autorités ont mis au point un système qui maîtrise les dépenses en agissant sur les prix des prestations mais aussi de leur volume.

Que le financement des hôpitaux évolue, soit, mais il est impératif de préserver tous les avantages de notre système qui font de notre pays un de ceux où les soins sont les meilleurs au monde.

 

 

Docteur Roland LEMYE,

Président de l'ABSyM

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